Chapitre VII

Appel respectueux et filial à l'Épiscopat espagnol

 

1. L'influence décisive de l'Eglise sur les événements actuels

Comme le montre l'ouvrage de notre TFP-soeur, la néo-révolution égalitaire et amorale, déchaînée par le PSOE en Espagne, est profondément et radicalement antichrétienne. Or, si l'on considère — disent les auteurs du livre — que les espagnols se déclarent catholiques presque à l'unanimité, on mesure facilement l'influence décisive de l'attitude de l'Episcopat sur les événements. Quand les catholiques seront convaincus que la néo-révolution socialiste contredit, ouvertement et en presque tous ses aspects, la doctrine catholique authentique, on pourra espérer que la société espagnole échappe au cataclysme vers lequel elle se précipite et que cesse le véritable génocide intellectuel et spirituel qu'elle subit.

 

2. La soumission aux Pasteurs légitimes

C'est pourquoi les auteurs se sont adressés aux Cardinaux, aux Archevêques et aux Evêques d'Espagne, à qui le Divin Maître a donné la mission de gouverner, de sanctifier et d'enseigner: «Nous désirons déposer à vos pieds, ou — si vous le permettez — élever à vos coeurs, nos perplexités. Pas le moindre esprit de contestation — aujourd'hui malheureusement si répandu dans l'Eglise elle-même — pas le moindre désir de rassembler les mécontentements dans un mouvement de rébellion contre les autorités légitimes, pour les renverser ou les affaiblir, ne nous anime. Notre passé — vous le savez — prouve largement le contraire. Nous avons la joie, comme fils et comme sujets, d'obéir et de défendre la hiérarchie qui, par la volonté divine, gouverne l'Eglise».

 

3. L'angoisse des catholiques devant le rôle joué par la Hiérarchie à cette croisée des chemins

«Il ne nous est pas permis, pourtant, de vous cacher les perplexités — plus encore, les angoisses — qui envahissent nos âmes en terminant ce livre. Nous vous les présentons avec respect». Alors TFP-Covadonga rappelle ce qui a été dit sur le rôle joué par la Hiérarchie ecclésiastique espagnole : d'abord dans l'affaiblissement du caractère de militant anticommuniste du catholique espagnol, puis dans la préparation d'un climat qui a rendu possible — grâce à l'appui des catholiques — le triomphe du PSOE, sa permanence au pouvoir et la réalisation de la «terrible et effarante» révolution socialiste.

 

4. Après la guerre civile, des fractions chaque fois plus importantes de la Hiérarchie ont progressivement abandonné les positions traditionnelles

Utilisant le droit reconnu à tout fidèle de faire connaître aux Pasteurs son opinion en ce qui concerne le bien de l'Eglise et, si c'est le cas, de la rendre publique (Canon 212, paragr. 3 du Code de Droit Canon), les auteurs de «L'Espagne anesthésiée sans le percevoir, bâillonnée sans le vouloir, déviée sans le savoir», poursuivent leurs réflexions sur l'influence décisive de l'Episcopat dans ces événements. Ils exposent alors qu'« à partir des années 40, des fractions de plus en plus importantes de la Hiérarchie ecclésiastique ont progressivement abandonné leurs positions traditionnelles. Cet éloignement s’est accentué dans les années 50 et, dans l'élan de ce que l'on a appelé `l'esprit du Concile', il est devenu officiel avec l'Assemblée Conjointe Evêques‑Prêtres de 1971 et par l’élection du Cardinal Tarancon à la présidence de la Conférence épiscopale»[1].  

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  « Si les évêques d’Espagne… »

 

Lucia, Francisco et Jacinta, les trois petits voyants de Fatima

 

L’unique voyante des apparitions de la Vierge à Fatima, qui vit encore, Sœur Lucie, a envoyé un message aux évêques d’Espagne : « …une commission de Notre Seigneur pour les évêques d’Espagne, et une autre pour ceux du Portugal. Dieu veut que tous entendent Sa voix. Il désire que ceux d’Espagne fassent ensemble une retraite et décident d’une réforme à appliquer au peuple, au clergé et à tous les ordres religieux ; (…) si les évêques d’Espagne ne répondent pas à Son désir, elle [la Russie] sera une fois de plus le fléau avec lequel Dieu les châtiera » (Lettre de 1943).

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5. L'ensemble de l'Episcopat ne défend déjà plus, dans la pratique, la totalité de la doctrine traditionnelle

TFP-Covadonga constate gravement qu'«il est déjà évident que l’ensemble de l'Episcopat espagnol ne défend plus, au moins en pratique, la totalité de la doctrine traditionnelle de l'Eglise et son application dans l'ordre temporel. Il est sûr — reconnaît-elle — que l'Episcopat n'adopte pas de position entièrement opposée à la doctrine traditionnelle de l'Eglise en ce qui concerne la morale sociale ou individuelle, ni n’assume la totalité des positions socialistes réunies dans ce que l'on a appelé la `révolution culturelle'. Mais lorsque par exemple — certains évêques comme Mgr Iniesta, Mgr Osés ou Mgr Buxarrais[2] donnent leur appui à certaines réformes de la révolution socialiste, les autres se taisent, sans que les catholiques sachent avec certitude si ce silence représente un accord qui ne dit mot, consent — ou un désaccord muet».

 

6. Comment se justifie cette effarante évolution?

TFP-Covadonga, s'adressant toujours aux Cardinaux, Archevêques et Evêques espagnols, déclare qu'«en analysant cette évolution, les catholiques ne peuvent l’attribuer à une vénalité de leurs Pasteurs. Ce serait une insulte (...). En général, les fidèles [estiment] que la raison de cette modification d'attitude de la majorité des Evêques a des racines doctrinales». Devant cette perplexité, qui est du domaine public, TFP-Covadonga demande: «Quelle justification doctrinale avez-vous pour expliquer cette évolution, sans que l'Eglise ne se renie elle-même ? Avez-vous fixé une limite à cette transformation ? Ou est-elle indéfinie ?»

 

7. Nous ne voyons pas comment cette évolution peut se concilier avec l'enseignement immuable de Notre Seigneur Jésus-Christ

Pour sa part, l'association affirme: «NN. SS. Cardinaux, Archevêques et Evêques, en tant que catholiques apostoliques romains, nous croyons à l'immuabilité des enseignements de l'Eglise et nous ne voyons pas comment cette 'évolution' peut se concilier avec les paroles du Divin Maître : ‘le ciel et la terre passeront plus facilement que ne tombera un seul petit trait de la loi' (Lc XVI,17) (...). Le catholique pense généralement que ce que vous faites est autorisé; que ce que vous permettez ne peut être illicite; que ce que vous interdisez, ou seulement rejetez, peut être interdit ou rejeté dans la mesure où vous l'interdisez ou le rejetez».

 

8. Comme fidèles, nous demandons le pain de la vérité

«Ainsi, devant l'opposition entre votre conduite antérieure et votre conduite actuelle — qui est devenue officielle en 1971 — les catholiques ne savent à quoi s'en tenir»[3]. «Ne soyez pas surpris que, comme fidèles, nous demandions à être instruits et éclairés. Plus encore ! En cette époque où vous comblez de toutes sortes d'attentions les pires adversaires de l'Eglise, nous sommes sûrs que vous ne nous refuserez pas une attitude paternelle».

«Accueillez-nous donc comme des fils qui ne demandent rien que du pain, pour que ne s'appliquent pas à ce cas les paroles des Saintes Ecritures : ‘les petits enfants demandent du pain, et personne ne le leur rompt' (Lc. IV, 4). Certainement vous vous associerez à ce que dit Notre Seigneur Jésus-Christ : 'En est-il un parmi vous qui donnerait une pierre à son fils qui lui demande du pain? Ou qui lui donnerait un serpent, quand il lui demande un poisson?'» (Mt. VII, 9-10).

 

9. Supplique pour une clarification sans équivoque

«La gravité et l’étendue de la question exigent une clarification sans équivoque. Si l'Episcopat ne désire pas donner un enseignement positif qui résolve définitivement le problème, les fidèles, manquant de cet enseignement, resteront perplexes et désorientés, et les socialistes pourront continuer tranquillement leur terrible psychochirurgie révolutionnaire. Aussi, une fois de plus nous vous en supplions: Parlez!.»

   

«C'est une erreur funeste de transiger avec les ennemis de Jésus-Christ»

 

 

 Bienheureux Ezéquiel Moreno y Diaz, évêque de Pasto (Colombie), béatifié par Paul VI en 1975 [et canonisé le 11 octobre 1992 à Santo Domingo en occasion du Vème centenaire de l'évangélisation de l'Amérique latine]:

 «Un jour viendra, c'est certain, où cette même révolution, sagace comme son chef, tournera en dérision et méprisera ceux qui la serviront ou qui, d’une manière quelconque, lui demanderont faveur ou grâce. C'est une erreur, et une erreur funeste pour l'Eglise et pour les âmes, de transiger avec les ennemis de Jésus-Christ et de marcher gentiment et complaisamment avec eux. La couardise sous couvert de prudence et de modération a fait plus de ravages dans l'Eglise de Dieu que les cris et les coups furieux de l'impiété. (...) Quel bien est-il sorti des gentillesses et des minauderies envers les ennemis de Jésus-Christ? Quels maux a-t-on évités, petits ou grands, par ce chemin? On n'obtient rien d'autre que d'affermir le pouvoir des mauvais, en diminuant, ô douleur!, la sainte haine que l'on doit avoir pour l'hérésie, l'erreur, et en habituant les fidèles à voir avec une certaine indifférence ces situations de persécution religieuse» (Cartas Pastorales, Circulares y otros Escritos, Imprimerie de la Hija de Gomez Fuentenebro, Madrid, 1908, p. 244).


NOTES

[1] Voir chap. III, 2, et les notes.

[2] En plein débat sur la légalisation de l'avortement, Mgr Iniesta, évêque auxiliaire de Madrid, a déclaré: les socialistes au pouvoir «ne sont pas, en tant que tels, des partisans de l'avortement..., il se trouve en fait que le gouvernement, en butte aux pressions des ambiances et des fractions pour l'avortement, a l'épée dans les reins» (Ya, 4/1/83). C'est-à-dire, commente TFP-Covadonga, que Mgr Iniesta cherche à présenter le PSOE, non comme un Hérode qui tue les innocents, mais comme un Pilate qui s'en lave les mains. Une autre fois, il a affirmé: «Par respect pour la liberté de conscience et le pluralisme dans la société, nous ne voyons pas d'inconvénient à accepter la légalisation d'aspects que nous ne partageons pas à cause de notre morale chrétienne, comme cela s'est passé pour l'adultère ou le divorce civil.» A propos de l'avortement, l'évêque regrette que ce soit «peut-être l'unique cas où, même si l'Eglise était plus ouverte, elle ne pourrait en conscience dire oui.» Surtout — ajoute-il — quand «nous nous sentons si unis (au PSOE) sur tant d'autres points.» Le désir d'établir une concordance «oecuménique» avec les socialistes amène l'évêque auxiliaire de Madrid à cette confession insolite: «Nous aimerions trouver des arguments scientifiques et objectifs qui nous démontreraient qu'il n'y a là aucune vie humaine de quelque degré que ce soit» (El Pais, 18/1/83). En ce qui concerne les blasphèmes verbaux, cachés sous le voile d'un humour irrespectueux, Mgr Iniesta ne s'oppose pas, bien au contraire, à la néo-révolution du PSOE. C'est à peine croyable, mais voilà ce qu'il écrit dans un de ses livres : «Dieu est bien retenu pour ne faire ni «diableries» ni sottises! (...) En fait, le Dieu qui s'est présenté en Jésus était très bohème, très anarque, très libéral et même — mon Dieu: je n'oserais le dire si ce n'était raconté dans l'Evangile — très libertin» (cf. Iniesta, Mgr Alberto, Escritos en la arena, Ed. PPC, Madrid, 1980, p. 28).

A propos de l'ordre socio-économique, Mgr Iniesta affirme: «J'attends (...) une Eglise qui revoie son attitude théologique sur le droit de propriété, ce mythe dont on découvrira bientôt que, même dans la pensée chrétienne, il a les pieds d'argile» (cf. Iniesta, Mons. Alberto; «Papeles prohibidos», Sedmay Ediciones, Madrid, 1977, p. 150). Mgr Buxarrais, évêque de Malaga, a affirmé pendant le débat sur le divorce: «Je crois que l'Eglise ne devrait pas se lancer dans la bataille du divorce civil» (Ecclesia, 5-2-77). Tout de suite après le triomphe des socialistes, en 1982, c'est un évêque qui lança un appel aux fidèles pour collaborer avec le gouvernement de Felipe Gonzales (cf. «Heraldo de Aragon», 26-11-82). Mgr Javier Osés, évêque de Huesca, a affirmé: «l'Eglise, et même les évêques, ne sont pas inquiets par l'arrivée du socialisme (...). Pour moi, il me plairait que ce gouvernement défende un socialisme 'social' (...)» (cf. Vida Nueva, 31-12-82). Auparavant, il avait découragé les catholiques dans leur lutte contre le divorce: «la bataille (contre le divorce), nous ne devons pas chercher à la gagner au niveau de la législation, dans les Chambres» (Las Provincias, 15-8-76).

[3] Le Père P. Gonzáles de Cardenal, que beaucoup considèrent comme le théologien officiel de l'Episcopat, décrit de manière impressionnante cette évolution: «Celui qui continue à suivre le catéchisme de son enfance, et l'imagerie religieuse des toits de son village natal (...) pourrait bien un jour se trouver dans une terre désertée et comprendre que son catholicisme et son église n'existent plus, qu'il est hors de l'église d'aujourd’hui, et que sont venus y habiter des gens qu’il a toujours considérés comme étrangers à la sienne » (apud. Juan González Anleo, «Identidad de los catolicos españoles », in AZCONA, Catolicismo en España — Analisis sociologico, pp. 117-118).


 

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