1 Nov 2023 | Actualités
Voici un texte qui a été écrit en 1956, Pie XII régnant, par le brésilien Plinio Corrêa de Oliveira (1908-1995), fondateur du mouvement catholique Tradition Famille Propriété. C’est une réflexion intemporelle, qui nous interpelle particulièrement en ces jours où l’on voit éclore un peu partout des récits d’un synode où les maîtres mots (même non formulés) était justement l’égalitarisme et le rejet de toute hiérarchie. Rappelons par exemple, le père James Martin qui se félicitait avant-hier (cf. Le Synode joyeux du père Martin, sj) de l’ambiance cool, malgré la présence de tant d’éminences et d’excellences (« appelez moi Jim, appelez moi Chito ») et s’émerveillait « que le cardinal-archevêque d’un archidiocèse écoute un étudiant de 19 ans du Wyoming. Ou que le patriarche ou le primat d’un pays écoute une femme professeur de théologie ».
Mais n’oublions pas que c’est François lui-même qui, tout en se comportant en despote absolu, autorise à certains toutes les familiarités, comme par exemple avec Macron lui passant la main dans le dos et le TUTOYANT!!!
par Plinio Corrêa de Oliveira
La vague satanique de l’égalitarisme qui, de la révolution protestante du XVIe siècle à la révolution communiste de nos jours, a attaqué, calomnié, écrasé et flétri tout ce qui est ou symbolise la hiérarchie, présente toute inégalité comme une injustice. Il est dans la nature humaine, disent les égalitaristes, que l’homme se sente rabaissé et humilié lorsqu’il s’incline devant un supérieur. S’il le fait, c’est parce que certaines idées préconçues, ou la règle des circonstances économiques, l’y contraignent. Mais cette violence contre l’ordre naturel des choses ne reste pas impunie. Le supérieur déforme son âme par son arrogance et sa vanité qui l’amènent à exiger que quelqu’un se plie devant lui. L’inférieur perd par son geste aliénant quelque chose de l’élévation de la personnalité propre à l’homme libre et indépendant. En d’autres termes, chaque fois qu’une personne s’incline devant une autre, il y a un gagnant et un perdant, un despote et un esclave.
La doctrine catholique nous dit exactement le contraire. Dieu a créé l’univers selon un ordre hiérarchique. Et il a fait de la hiérarchie l’essence de tout ordre véritablement humain et catholique.
Considérons deux photographies.
Dans une chartreuse espagnole, un moine agenouillé embrasse le scapulaire de son supérieur. C’est l’expression d’une soumission totale.
Au contact du supérieur, l’inférieur peut et doit lui rendre tous les égards, sans la moindre crainte de s’abaisser ou de se dégrader. Le supérieur, quant à lui, ne doit pas être vaniteux ou arrogant. Sa supériorité ne découle pas de la force, mais d’un très saint ordre des choses voulu par le Créateur.
Dans l’Église catholique, les coutumes expriment cette doctrine avec une admirable fidélité. Nulle part ailleurs les rites et les formules de politesse ne consacrent aussi fortement le principe de la hiérarchie. Nulle part ailleurs n’apparaît aussi clairement la noblesse de l’obéissance, l’élévation de l’âme et la bonté de l’exercice de l’autorité et de la prééminence.
Mais considérez la scène avec attention et vous verrez combien de virilité, de force de caractère, de sincérité de conviction, d’élévation de motivation l’humble moine agenouillé met dans son geste. Il y a là quelque chose de saint et de chevaleresque, de grandiose et de simple, qui rappelle à la fois la Légende Dorée, la Chanson de Roland et les Fioretti de Saint François d’Assise.
Agenouillé et inconnu, cet humble ecclésiastique est plus grand que l’homme moderne, molécule vaine, impersonnelle, anonyme et inexpressive de la grande masse amorphe en laquelle la société contemporaine s’est transformée.
Deuxième photographie. Après l’humilité du moine, voyons celle du gentilhomme.
Le comte Wladimir d’Ormesson a été ambassadeur de France auprès du Saint-Siège jusqu’à la mi-1956. Sur notre photographie, il est vêtu de l’uniforme solennel du diplomate, agenouillé devant le Saint-Père Pie XII lors d’une audience. Il est difficile d’imaginer une attitude qui exprime aussi complètement une haute conscience de sa propre dignité et un vif respect pour la haute et suprême autorité devant laquelle l’ambassadeur a l’honneur de se tenir. Le genou à terre, mais le torse et le cou dressés, la noblesse et la révérence de la salutation, tout, en somme, montre combien le respect et la dignité sont contenus dans les styles diplomatiques traditionnels, dont le comte se montre ici un fidèle interprète, et qui se sont développés au cours des siècles d’or de la civilisation chrétienne.
D’autre part, considérons le prieur. Il y a une sorte de contraste entre sa grande figure blanche, droite, robuste, exprimant l’autorité, la sécurité et la protection paternelle, et l’expression physionomique qui semble neutre, impassible, sereine, quelque peu distante. La silhouette exprime l’attitude officielle du prieur. La physionomie exprime le détachement, la simplicité de l’homme. Car ce n’est pas l’homme en tant que tel, mais la fonction, à laquelle l’hommage est adressé.
Et, avec tout le respect qui lui est dû, considérons la position du Pontife. Assis sur un petit trône, il ne se lève pas pour recevoir l’hommage de l’ambassadeur. En revanche, il incline légèrement son buste pour s’approcher du comte. Il prend sa main dans la sienne. Il donne à l’ensemble de la réception une note de cordialité très marquée. Et tout en restant cependant entièrement pape, il donne tous les signes de la plus chaleureuse bienveillance et de la plus haute estime pour l’ambassadeur.
Quatre attitudes inspirées d’une vision très hiérarchisée des choses : toutes nobles, dignes, honorables, mais chacune à sa manière. En un mot, la splendeur de l’humilité chrétienne et la beauté d’une vie hiérarchique.