Plinio Corrêa de Oliveira
L'agonie et la mort de Staline La victoire de Dieu !
"Saint du jour", 13 janvier 1975 (*) |
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On pourrait presque appeler le commentaire d’aujourd’hui "le diable du jour" [normalement le Prof. Plinio faisait le commentaire sur le Saint du jour, n.d.tr.]. Il s'agit de l'agonie et de la mort de Staline. Le texte est tiré de Vingt lettres à un ami, un livre de la fille de Staline, Svetlana Alliluyeva, publié en 1967 (Ed. Seuil) : « Sa respiration est devenue de plus en plus courte. Au cours des 12 dernières heures, le manque d'oxygène était aigu. Son visage s'est modifié et est devenu sombre. Ses lèvres sont devenues noires et ses traits sont devenus méconnaissables. L'agonie a été terrible. Il s'est littéralement étouffé sous nos yeux. À ce qui semblait être le tout dernier moment, il a soudainement ouvert les yeux et jeté un regard sur tout le monde dans la pièce. C'était un regard terrible, fou ou peut-être en colère et rempli de la peur devant la mort et devant les visages inconnus des médecins penchés sur lui. Puis il s'est passé quelque chose que je n'ai toujours pas compris. Il a levé la main gauche comme s'il désignait quelque chose au-dessus de lui et lançait une malédiction sur nous tous. Le geste était plein de menace, et personne ne pouvait dire à qui ou à quoi il s'adressait. L'instant d'après, après un dernier effort, l'esprit s'est arraché à la chair ».
Cette description est très bonne. Je soutiens que certaines narrations très bien faites ont plus de valeur qu'un film ou qu'un documentaire ; car en regardant un film ou un documentaire, une personne a plusieurs impressions simultanées, mais elle n'est pas toujours capable de sélectionner ces impressions pour en retirer celles qui sont vraiment les plus importantes et les plus appropriées. Dans ce cas concret, l'image est pleine de notes que vous pouvez imaginer. Figurez-vous l'immensité du Kremlin, une mystérieuse forteresse au cœur de Moscou, toute entourée de murs. À l'intérieur, un nouveau drame se joue, cette fois la mort d'un dictateur. Et le dictateur est un homme débauché - Staline - qui se meurt. C'est un processus inévitable de maladie ou d'empoisonnement qui atteint un certain paroxysme et produit le déchirement, la dilacération. L'âme se sépare du corps. Il est impuissant, mais son corps puissant lutte encore pour conjurer la mort. La mort le prosterne donc de plus en plus, mais il réagit avec une sorte de fureur sauvage, une sorte de force biologique et psychologique « antédiluvien ». Alors que tout en lui se brise, il réagit de plus en plus avec une impétuosité toujours plus grande, dans la mesure où les coups de la mort le dépassent de plus en plus. Il est comme un arbre gigantesque dont on ne peut mesurer le véritable diamètre que lorsque le bûcheron coupe la base du tronc et voit combien l'arbre était réellement colossal. Ainsi est coupée la vie de cet homme. Mais nous pouvons constater qu'il meurt loin de la grâce de Dieu. Rien autour de lui ne transmet l'idée de la religion. Toute sa vie a été celle d'un athée et d'un partisan de l'athéisme ; un homme, donc, qui, même s'il croyait secrètement en Dieu, l'avait si gravement offensé qu'on est porté à supposer qu'il est tombé dans le péché du désespoir, sinon dans celui (également au for interne) de nier l'existence de Dieu. Par conséquent, il se meurt de haine, de désespoir. Sa nature aspire l'air, qui devient de plus en plus rare ; il est miné de toutes parts. À un moment donné, celui qui n'avait rien fait d'autre dans la vie que de régner par la terreur, conduit par la force de la haine - réalisant la situation dans laquelle il se trouve et ne percevant peut-être pas très bien ce qui se passe, croyant peut-être avoir été empoisonné, ouvre les yeux, jette un regard terrible sur tout le monde et, se sentant confusément vaincu, tente de se défendre. Il lève son bras gauche de manière menaçante - c'est la seule chose qu'il savait faire. Quelques secondes plus tard, Dieu appelle son âme pour le jugement. Son bras tombe et il n'est plus qu'un cadavre. L'homme qui avait haï et gouverné avec brutalité toute sa vie, cet homme cède maintenant, s'effondre et s'écroule. Puis, la rigidité cadavérique s'installe. Celui qui sait interpréter ces scènes avec les yeux de la foi dira qu'une seule chose demeure : la victoire de Dieu. L'homme a tout fait et puis c'était fini. Lorsque Dieu a décidé de l'appeler, il n'a pas pu prolonger sa vie, ne serait-ce que d'une minute. Il était étendu là, complètement écrasé : un cadavre. Il n'était plus rien, n'avait plus rien, ne pouvait plus rien faire. Il a été liquidé. La futilité de la révolte, l'inutilité de l'athéisme et de la haine se manifestent à ce moment extrême, car Dieu a complètement gagné. Et Staline s'est présenté devant le tribunal de Dieu comme n'importe qui d'autre, comme n'importe quelle petite, pauvre et insignifiante âme sans personnalité. Lui qui, à certains points de vue, avait été un géant, apparaissait maintenant misérable, devant le trône de Dieu. Tout est si petit et insignifiant devant Dieu ! Staline, le criminel, est maintenant jeté en Enfer, la poubelle et le pénitencier de la Création, peut-être au moment même où une petite âme est amenée dans le giron de Dieu pour l'adorer pour l'éternité. Fin de l'histoire. C'est la fin de la haine et une manifestation claire de son inutilité. Rejeté en marge de tout le plan de la Création, plus pris en compte pour quoi que ce soit, méprisé et refusé, Staline est passé du Kremlin directement en Enfer, où la farandole infernale ne fait que commencer. Ressentir la haine de Dieu est incomparablement plus terrible que de mourir. Ainsi prend fin le pouvoir de ceux qui défient Dieu, Notre Seigneur Si se couper un doigt est si terrible, on peut imaginer combien est terrible l'heure où une personne est déchirée, l'âme étant arrachée du corps. Lorsque l'âme envoyée en enfer se présente devant Dieu, elle ressent déjà dans ce terrible tourment la haine de Dieu. Et la haine de Dieu est incomparablement plus terrible que la mort. Ayant été jugée, l'âme plonge en enfer. Et en enfer, elle sent déjà le feu qui ne s'éteint jamais, elle entend les rires rauques et ressent les tortures, les insultes et les humiliations éternelles de chacun de ceux qui s'y trouvent. Telle est la réception d'une mauvaise âme. Alors que les âmes qui entrent au Ciel sont reçues avec un concert d'harmonie, les mauvaises âmes qui vont en Enfer et sont reçues avec une sinistre agression par tous, des rires de malheur, des moqueries, des horreurs, des dilacérations. Nous savons que Sainte Thérèse de Jésus [Avila 1515-1582] a vu sa place en Enfer ; et elle raconte que ces endroits sont des fours brûlants extrêmement chauds disposés en forme de ruche, avec une cellule pour chaque personne ; mais une personne ne peut pas y entrer entièrement et doit être pliée en deux dans une position horrible ; elle est poussée dedans et y brûle pour toute l'éternité dans l'obscurité et le désespoir les plus complets. Staline tombe donc du Kremlin, le sommet du pouvoir, dans cette destruction de tout pouvoir, l'anéantissement complet. Il profère un dernier blasphème, fait un dernier acte suprême de haine, et puis son châtiment arrive. Il est écrasé et c'est la fin. Ainsi prend fin le pouvoir de ceux qui défient Dieu, notre Seigneur. Aussi terrible que soit sa mort, un catholique a l'idée qu'il va vers la glorification, l'apothéose... Est-il utile de faire des commentaires à ce sujet ? Je pense que oui, afin que nous puissions voir la différence entre cette mort et celle d'un catholique, aussi terrible soit-elle. S'il meurt lucide - pas d'une mort subite - tant qu'il a la Foi, il se rend compte qu'il se détache lentement d'un corps mortel qui est une carcasse qui le retient et l'empêche de voir Dieu ; et que dans une minute, une demi-minute ou dix secondes, il passera par un choc énorme mais sera placé devant la vision béatifique et entrera alors dans un bonheur infini et complet. Il verra Dieu avec une perfection indescriptible ; et en même temps il verra toutes les âmes du Ciel, à commencer par la Vierge, tous les Anges, le Paradis céleste, qui est incomparablement plus haut, plus beau et plus noble que le Paradis terrestre ; et là il aura des joies sans fin et indescriptibles. Ainsi, alors qu'il sent de plus en plus que la mort le détruit, il sait qu'il ne va pas vers l'humiliation. Il a l'idée qu'il va vers la glorification. Il est sur le point de recevoir sa couronne de gloire. Dans ces conditions, la mort de cet homme est le chemin vers ce que l'on pourrait appeler l'apothéose. La dernière horreur est le moment où toutes les horreurs cessent et où commence une éternité heureuse. L'homme sent l'amour de Dieu comme jaillissant sur lui, l'entoure complètement, l'attirant à lui, guérissant en lui toutes les blessures, toutes les douleurs que la vie lui avait infligées, et le plaçant dans un bonheur ineffable. Nous pouvons nous en faire une idée à travers les visions des mystiques. Tous les mystiques décrivent l'état d'extase comme étant un état de bonheur insondable, même s'il ne dure que quelques instants fugaces ; un état de bonheur indescriptible. Un mystique sur cette terre n'a qu'en passant, et de façon très incomplète, je crois, ce que l'âme a au Ciel en voyant Dieu face à face. C'est ainsi que la mort se présente au mystique. Face à "l'irréparable outrage du temps", l'homme de Foi dit : "Je marche vers ma résurrection" L'autre jour, j'ai entendu parler d'un commentaire fait par une vieille dame émaciée qui couvrait une partie de son visage chaque fois qu'elle se trouvait face à un miroir. Cela m'a fait penser à l'expression française « Pour réparer des ans l'irréparable outrage ». C'est vraiment un outrage que personne ne remarque chez personne : la vieillesse outrage lentement mais sûrement l'homme - et cela se retrouve même dans la Chanson de Roland ; dans la vieillesse lucide de Charlemagne, il y a un épisode où il évoque l'idée d'aller aider Roland et un lâche vient lui dire : "Ne voyez-vous pas, Sire, que vous êtes retombé en enfance et que vous n'êtes plus capable de bien raisonner ? Ne voyez-vous pas que ce n'est pas le moment d'aller aider votre neveu ?". C'est un outrage, une insulte d'entendre une telle chose. Mais un homme ou une femme de Foi verrait cette maigreur et dirait : "Je marche vers ma résurrection. Ceux qui sont derrière marchent vers leur vieillesse. Je marche vers la résurrection." On regarde son propre corps et on dit : "Ma chair va ressusciter ! Et elle ressuscitera pour le bonheur éternel !"
Clemenceau - Saint Louis Gonzague Imaginez Staline, encore en bonne santé, assis près d'une cheminée au Kremlin, pensant à ses domaines et à ce feu. Comment est l'autre feu ? Puis il regarde sa main, pensant que sa chair va ressusciter pour brûler éternellement. Quelle horreur ! Il y a quelque temps, j'ai lu la vie de Clemenceau. Il était athée et en tant que président du Conseil des ministres français, pendant la Première Guerre mondiale, il s'est exposé avec un grand courage sur de nombreux fronts de bataille. Et ayant atteint une extrême vieillesse, il restait assis pendant des heures, ne pouvant s'empêcher de penser à la mort. Il en connaissait bien la raison. Ce n'est pas le cas d'un catholique. Un jour, saint Louis Gonzague jouait à une sorte de jeu de quilles au noviciat de la Compagnie de Jésus et on lui demanda - ainsi qu'à tous les novices - ce qu'ils feraient s'ils savaient que la fin du monde arriverait dans quinze minutes. Un novice a répondu : "Je m'arrêterais pour prier" ; un autre a dit autre chose. Calmement, Saint Louis a répondu : "Je continuerais à jouer". Telle est la sérénité d'une âme juste. Comme c'est différent de la fin de Staline ! Comme il serait merveilleux d'imaginer Saint-Louis Gonzague jouant au bowling au bout du monde et voyant alors que le sol commence à trembler. Il dit : "Eh bien, maintenant nous ne pouvons plus jouer. Asseyons-nous et attendons le Fils de l'homme, qui vient en toute pompe et en toute majesté !". C'est dire à quel point les deux voies sont différentes. Il est toujours bon d'y réfléchir.
Le Couronnement de la Très Sainte Vierge (Fra Angelico) (*) Le texte ci-dessus a été traduit et adapté par ce site. Sans révision par l’auteur. |