|
L’autodémolition de l’Église,
facteur de
démolition du Chili
|
|
|
Ceci est une synthèse du manifeste publié par la Société Chilienne de Défense de la Tradition, Famille et Propriété, à Santiago, le 27 février 1973, sous le titre « L’autodémolition de l'Eglise, facteur de démolition du Chili ». Dans ce manifeste, on détache le rôle de la hiérarchie catholique dans le processus de « marxisation » de ce pays. I – La faiblesse des catholiques : raison déterminante de l’avance communiste Publié peu avant les élections chiliennes, le manifeste démontre que, dans ce pays, le facteur pro-marxiste le plus influent est représenté par le Clergé et la Hiérarchie qui, pris dans leur ensemble, agirent pour |'ascension d’Allende et l`aident encore dans l’exécution de son programme marxiste. L’action du Clergé et de la Hiérarchie est d'une portée profonde dans un pays catholique comme le Chili, où l’attitude des fidèles devant certains problèmes nationaux dépend de l’orientation qu’ils reçoivent. II – Prêtres, socialisme et misère 1. Avant les élections présidentielles de 1970 A mesure que la campagne présidentielle de 1970 avançait, des groupes de catholiques se ralliaient à la candidature marxiste de M. Allende et, quoique numériquement peu représentatifs, cela servit à faire croire à de nombreux catholiques qu'il était licite d'appuyer un candidat marxiste. Ce fut le cas, par exemple, du P. Hernán Larrain, S. J., directeur de la revue « Mensaje », qui déclara à la télévision : « Je ne vois aucune raison qui puisse empêcher un chrétien de voter pour un marxiste ». L'adhésion cléricale au marxisme et l'impunité dont elle jouit de la part de la Hiérarchie allèrent jusqu'au point de rendre un hommage public à Lénine dans l'Eglise de Sainte-Catherine, de Santiago, annoncée par avance par le journal « El Siglo » (18 et 22 avril 197O) ; la cérémonie fut présidée par le curé et le dirigeant local du PC. Celles-ci et plusieurs autres prises de position du Clergé en faveur du marxisme furent révélées par des journaux aux nuances idéologiques les plus diverses, et amplement exploitées par la presse gauchiste pour confondre l'électorat catholique. Cependant, ce qui attira le plus l'attention du public fut, peut-être, le mutisme absolu des Prêtres conservateurs – dans son ensemble et presque sans exceptions – pendant la campagne présidentielle; même les voix les plus autorisées du Clergé anticommuniste se turent. 2. Avant le choix du Président par le Congrès National Suivant la logique de ces antécédents, lorsque Allende fut élu, l'euphorie progressiste se manifesta en plusieurs occasions. Rappelons-en quelques-unes : - Le P. Manuel Segura, à celle époque-là Provincial de la Compagnie de Jésus, adressa une lettre à tous les Jésuites, où il les exhortait à collaborer avec le programme de l'UP. - La « Jeune Eglise », dont les membres s'emparèrent de la Cathédrale de Santiago en 1968 donnant lieu à un scandale de répercussion mondiale, manifesta publiquement son « adhésion sincère » à Allende (« CIDOC », Cuernavaca, n. 253). 3. Allende au pouvoir Pendant les deux années et quelques mois qui s'écoulèrent depuis le 4 novembre 1970, la sympathie ou l'adhésion au marxisme de la part de certains prêtres et de certains laïcs catholiques, aussi bien que de certaines institutions dépendantes de l'Eglise, fut constante. Nous citons ensuite quelques faits plus caractéristiques : - 120 prêtres se réunirent à Santiago avec Fidel Castro, lorsqu'il visita le Chili en novembre 1971. Telle était la fièvre d'enthousiasme marxiste dans plusieurs secteurs du Clergé que, non contents de collaborer avec le marxisme au Chili, ils éprouvèrent le besoin d'envoyer de lyriques manifestations d'appui au marxisme cubain. Un groupe se rendit même par la suite à Cuba pour travailler à la récolte de la canne à sucre... (« La Tercera », 15 décembre 1971; « El Clarin », 18 mars 1972). — La Première Rencontre des Chrétiens pour le Socialisme eut lieu à Santiago, en avril 1972, « commandée » par Mgr Méndez Arceo, Evêque de Cuernavaca, Mexique. A ce moment-là, 400 délégués de 28 pays se prononcèrent résolument en faveur d'un socialisme qui élimine entièrement la propriété privée des moyens de production, comme la seule issue pour les pays sous-développés. Ils appuyèrent la lutte de classes, firent des éloges à « Che » Guevara — à la statue duquel ils déposèrent une couronne de fleurs — et entonnèrent la louange du Prêtre apostat et chef guérillero Camilo Torres (« La Nacion », 27 avril 1972; « El Mercurio », 21 mai 1972; « Ercilla », 10-16 mai 1972). Les faits mentionnés sont tout à fait concluants. Mais — comme il est notoire au Chili — il y en a des centaines d'autres qui vont dans le même sens. Ainsi se trouve nettement mis en évidence un processus pro-marxiste incessant, auquel les catholiques sont soumis précisément par des prêtres destinés à être leurs guides naturels... 4. La contradiction révélatrice du progressisme D'autre part, les faits présentés mettent à nu une contradiction étonnante de la part du Clergé progressiste. Car celui-ci, avant l'ascension d'Allende, s'immisçait ouvertement dans les questions de caractère politico-social, prétendant délivrer ainsi le peuple de la pauvreté. Mais, lorsque cette misère — que le Chili n'a jamais connue avant Allende — est le fruit de l'implantation d'un régime marxiste, le même Clergé ne bouge pas; au contraire, il appuie celui qui la produit. L'exposé ci-dessus laisse voir, en outre, que ce Clergé cachait ses vrais desseins, en adoptant une attitude de combat contre la misère. Car il savait qu'il serait mal reçu par le peuple s'il révélait les buts idéologiques réels auxquels il aspirait. Aujourd'hui, lorsqu'il s'agit de maintenir un régime marxiste, il laisse voir le fond de ses vrais objectifs. La contradiction qu'on remarque dans l'attitude du Clergé progressiste a une explication. Pour lui, l'avènement d'une société rigoureusement égalitaire, selon l'idéal marxiste, est une idole à laquelle doit être sacrifié en holocauste l'intérêt matériel de la nation. Cet intérêt, en réalité, sert de simple jouet, de facteur pour renverser ce qu'ils veulent détruire. Et, ensuite, il est considéré comme quelque chose de tout à fait superflu, dont le peuple doit endurer la privation en immolation au régime, lorsque celui-ci correspond à leurs buts idéologiques. On remarque ici une sorte de mysticisme marxiste qui se reflète dans les thèses politico-sociales prêchées par les prêtres progressistes. Les prêtres tenus comme non progressistes qui, par inaction et par leur mutisme généralisé, octroient un aval inappréciable au courant le plus actif du Clergé qui favorise le marxisme, partagent aussi cette position aberrante. III - Au-dessus des prêtres, l’Épiscopat Le respect de la logique rend inévitable une question : cette dissémination si généralisée de la gangrène communo-progressiste entre prêtres et laïcs, aurait-elle été possible sans la stimulation ou la complaisante tolérance de la grande majorité de leurs supérieurs hiérarchiques ? Quelle fut, alors, l’attitude de l’Episcopat national, dans son ensemble, devant cette situation? Les journaux montrent que, d’une part, il y eut une solidarité effective - quoique tacite - entre l’Episcopat, les prêtres et laïcs qui se compromettaient en faveur du régime marxiste de M. Allende. En fait, la Hiérarchie chilienne maintint un silence notoire, étonnant et même scandaleux, en face de la situation décrite. D’autre part, l’Episcopat chilien lui-même, pris dans son ensemble, a donné de claires manifestations de son appui au régime marxiste de M. Allende. Nous le disons parce que Mgr le Cardinal et plusieurs évêques formulèrent des déclarations dans ce sens, et que les figures de l’Episcopat qui passent pour anticommunistes ont fait corps avec eux. 1. Avant les élections présidentielles de 1970 Parallèlement, depuis déjà quelque temps, l’opinion publique remarquait des manifestations croissantes d’hostilité de la part de personnalités épiscopales représentatives, contre ceux qui combattaient catégoriquement le communisme. Précisément pendant une campagne destinée à dénoncer l’infiltration gauchiste dans des milieux catholiques, la Société Chilienne de Défense de la Tradition, Famille et Propriété fut l’objet d’une note aigre de l’Archevêché de Santiago, qui manifestait, en août 1968, son mécontentement en face d’une telle initiative (« El Mercurio », 11 août 1968). Trois jours après, des prêtres et des laïcs s’emparaient scandaleusement de la Cathédrale de Santiago et divulgaient publiquement des slogans pro-marxistes... (« Fiducia », n" 31). 2. Avant le choix du Président par le Congrès national Trois jours après l’élection présidentielle, Mgr Jorge Hourton, Administrateur apostolique de Puerto Montt, affirmait dans un document public : « Le peuple du Chili choisit un gouvernement démocratique et de progrès social; il a le droit d’attendre et d’exiger que celui-ci lui soit donné, et pas autre chose » (« CIDOC », Cuernavaca, n" 251). 3. Allende au pouvoir Le 22 avril 1971, les évêques émirent une déclaration confuse dont l’ambiguïté honteuse finit par ouvrir les portes à la collaboration avec le régime marxiste d’Allende. On y lit : « Devant le gouvernement légitime du Chili, nous réitérons l’attitude qui nous vient du Christ : respect à son autorité et collaboration à sa tâche de servir le peuple. Tout l’effort pour construire une société plus humaine, qui élimine la misère, qui fasse prévaloir le bien commun sur le bien particulier, requiert l’appui de qui, comme chrétien, est engagé dans l’affranchissement de l’homme » (« El Diario Austral », 22 avril 1971). Lorsque Fidel Castro visita le Chili en novembre 1971, il fut reçu ostensiblement, dans leurs diocèses respectifs, par le Cardinal accompagné d’autres évêques à Santiago, par les archevêques d’Antofagasta et de Conception, et par les évêques de Iquique, Puerto Montt et Punta Arenas (« Tribuna », 25 novembre 1971). Puisque le Chili est un pays où l’église est séparée de l’Etat, la visite du dictateur cubain aux autorités ecclésiastiques n’avait pas un caractère protocolaire obligatoire et officiel, mais c’était simplement la manifestation de son désir d’être bien reçu par l’Episcopat, pour impressionner le public chilien. L’intervention de l’Episcopat, faisant usage de son autorité pour presser moralement les fidèles d’appuyer, ou tout au moins d’accepter, la marche du Chili vers le communisme, atteignit un sommet caractéristique pendant la grève d’octobre de l’année dernière. Devant un peuple qui non seulement ressentait la misère, mais encore sortait dans les rues en foule pour protester contre elle - en des événements mémorables, comme la « marche des casseroles vides », de décembre 1971 - il n’y eut pas un seul prêtre, pas un seul évêque présent pour manifester leur solidarité à ce peuple qui gémissait. Au contraire, le Comité Permanent de l’Episcopat en vint à manifester le désir que « l’on continue le processus de changements tendant à affranchir les pauvres de toute situation d’injustice et de misère » (« El Mercurio », 22 octobre 1972; « Ultimas Noticias », 21 octobre 1972). Comme l’on voit, toutes les formes et les degrés d’appuis que le gouvernement marxiste d’Allende aurait pu désirer de l’Episcopat lui furent donnés de façon continuelle et plus que suffisante. Et cela même si l’on fait exception de quelques évêques antérieurement évoqués qui ne se prononcèrent pas, mais qui, par leur silence, furent tenus par la Nation - à juste titre - pour complices de l’aberration commise par les évêques qui se prononcèrent.
IV - A la tête de l’Épiscopat : le Cardinal Archevêque de Santiago Les faits mentionnés bien examinés, on ne peut pas manquer de se demander : l’Episcopat aurait-il pris cette attitude si son Eminence le Cardinal avait exercé son influence dans le sens contraire? Il semble évident que non. Il n’est pas vraisemblable que l’Episcopat aurait adopté une attitude d’intervention si constante et si définie dans les affaires politiques du Pays, et qui est sans précédents dans l’Histoire contemporaine, sans la stimulation du Cardinal-Primat. Encore plus lorsque cette intervention viole de façon aussi flagrante l’ordre naturel des choses, puisqu’elle s’exerce en faveur d’un régime marxiste. La réalité des faits démontre que l’attitude des laïcs, prêtres et évêques en faveur de l'actuel régime n’est qu’un reflet cohérent et fidèle des positions assumées par le Cardinal, Mgr Silva Henriquez. Rappelons ici celles qui s’exercèrent d’une façon plus notoire, dans un sens de pression et de confusion de l’opinion catholique : - En décembre 1969, il déclara à la presse qu’il était légitime à un catholique de voter pour un candidat marxiste (« Ultima Hora », 24 décembre 1969). Cependant, le Cardinal jugea préférable de ne pas démentir ni éclaircir son affirmation publique et, en outre, il refusa d’une manière peu pastorale et très grossière toute réponse à la TFP (« Fiducia », supplément du n° 31). - Une fois ratifiée l’élection de M. Allende par le Congrès national, Mgr Silva Henriquez rendit visite à Allende, lui offrit une Bible et se fit photographier plusieurs fois à côté de lui, en attitudes de grande amitié. Il fit des déclarations à la presse cubaine, où il loua Allende et offrit son appui et sa collaboration aux « réformes de base » du programme de l’Unité Populaire; et pria Dieu « d’aider le peuple cubain dans le travail qu’il est en train d’accomplir » (« Ultima Hora », 12 novembre 1970). - A l’occasion de l’ascension du président marxiste au pouvoir, il présida un Te Deum œcuménique dans la Cathédrale, avec la participation de pasteurs protestants et de rabbins (« La Revista Catolica », n° 1015, p. 5885). - Au 1er mai 1971, pour la première fois dans l’Histoire, le Cardinal assista au meeting de la Centrale Unique des Travailleurs – contrôlée par le Parti Communiste - s’asseyant à la tribune à côté d’Allende et de ses ministres. - En novembre 1971, il reçut Fidel Castro à l’aéroport de Santiago, alla à un cocktail offert au dictateur cubain dans le palais présidentiel de la Moneda, et maintint avec lui un cordial entretien à l’archevêché, lorsqu’il lui donna une Bible comme cadeau. Castro le qualifia de « personne magnifique” (« El Siglo”, 24 novembre 1971; “El Clarin », 24 novembre 1971). De son point de vue, il avait de bonnes raisons pour dire cela... - En décembre de la même année, il déclara à la télévision que le gouvernement travaillait sincèrement et péniblement pour le bien-être de la collectivité. Cette déclaration fut faite lors de la « marche des casseroles vides » (« Ultima Hora », 27 décembre 1971), où plus de 100 000 ménagères protestèrent dans les rues de Santiago contre le manque de vivres engendré par la politique du gouvernement. Interventionnisme clérical pour empêcher le conflit légal des opinions ? Tout cet ensemble impressionnant d’attitudes que le Clergé chilien, du haut en bas, commença à adopter dans les dernières années devint insupportable dans un pays où les mêmes évêques se disent partisans de la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Lorsque les miristes (militants du MIR - Mouvement de Gauche Révolutionnaire) commencèrent à assaillir de nombreuses propriétés - sans l’opposition efficace de la police - il y eut dans quelques régions un climat de violence et de contre-violence. Alors, l’Episcopat soutint continuellement sa position hostile à la violence. Personne ne nie, bien sûr, le droit de S. Eminence Mgr le Cardinal et NN.SS. les Evêques de manifester leur souci contre la violence. En vérité, ils auraient dû attaquer la violence du terrorisme miriste et de ses congénères, et appuyer la contre-violence exercée en légitime défense par les propriétaires assaillis. En outre, il faut remarquer que NN.SS. les Evêques ne tiennent pas non plus juste compte du fait que la plus grande violence au Chili n’est pas celle qui est en marge de l’action de l’Etat, mais c’est la violence pratiquée par l’Etat lui-même, par la transgression continuelle des droits individuels et naturels. Encore moins tolérable dans les circonstances actuelles est le fait que les évêques, dans leurs déclarations contre la violence, prouvent la désunion qui est le propre du régime démocratique. Par de telles attitudes, Mgr le Cardinal et NN.SS. les Evêques essaient de promouvoir virtuellement une coalition générale du peuple avec le gouvernement, en se servant ainsi de leurs investitures sacrées pour asphyxier les manifestations légitimes de protestation, provoquées par la violation de quelques droits naturels, aussi bien que par les crises et les scandales qu’un régime antichrétien crée dans la conscience catholique. Cela est encore plus digne de remarque si l’on considère qu’une telle protestation s’exprima suivant la nature du régime politique, qui est démocratique. Si Mgr le Cardinal et NN.SS. les Evêques sont hostiles à la démocratie, pourquoi ne le disent-ils pas ? Ou bien devons-nous aller plus loin, en admettant alors que Mgr le Cardinal et NN.SS. les Evêques lui sont favorables lorsqu’ils jugent que celle-ci sert d’instrument pour renverser le régime de la propriété privée, et qu’ils lui sont hostiles quand ils y voient une forme de défense de ce droit naturel ? ! V – Le Saint-Siège Enfants dévots de la Sainte-Eglise, c’est avec une profonde douleur que nous assistons au déroulement de ce processus, au cours duquel les principes doctrinaires inspirateurs de l’autodémolition de l’Eglise débordent de la sphère proprement religieuse, et pénètrent toujours plus dans la vie publique du Pays, en y produisant ainsi les effets tout aussi délétères. Cette profonde tristesse coexiste en nous avec un sentiment de respect également profond et, en outre, inaltérable. Nous savons que la Sainte-Eglise Catholique ne s’identifie pas avec les fautes de ses enfants, si haut placés qu’ils soient. Et qu’elle continue, donc, infaillible et indéfectible aujourd’hui, comme hier, comme dans tous les siècles futurs. Aimer l’Eglise implique aimer d’une manière très spéciale sa tête visible, c’est-à-dire, le Pape. Et, avec elle, le Saint-Siège. Nous renouvelons ici l’expression de tout notre amour révérenciel, de notre adhésion au Souverain Pontife et au Saint-Siège, au moment où, avec une douleur profonde, nous sommes obligés, par la logique même de notre pensée, d’aborder une autre question : - Pourrait-on comprendre que les structures hiérarchiques de l’Eglise au Chili puissent agir comme elles sont en train d’agir, si elles n’avaient pas reçu une approbation entière et directe de Paul VI pour le faire? Cette question devient d’autant plus inévitable si l’on considère que Mgr Silva Henriquez, comme Cardinal, maintient un contact permanent avec le Vatican. Et, d’autre part, un Nonce apostolique chargé non seulement de représenter le Vatican auprès du gouvernement chilien, mais encore auprès de l’Episcopat, se trouve continuellement au Chili; Nonce qui dispose de toutes les facilités possibles pour transmettre au Cardinal Silva Henriquez, à l’Episcopat et au Clergé en général, les intentions de Paul VI. Il est incroyable que cette approbation n’existe pas si nous considérons les liens cardinalices et la structure hiérarchique de l’Eglise en général, ou encore la constance et l’ampleur de cette politique inusitée du Clergé au Chili. D’autre part, pendant cette période, aucune manifestation – même voilée - de froideur ou de malaise du Vatican par rapport aux prises de positions du Cardinal, de l’Episcopat et du Clergé vis-à-vis du régime marxiste de M. Allende, ne transparut. Au contraire, les faits connus corroborent ce que la déduction logique oblige à conjecturer : - Aussitôt qu’Allende fut élu par le Congrès, le Cardinal, accompagné du secrétaire de la Conférence épiscopale, Mgr Oviedo, et du Vicaire général de l’Archidiocèse de Santiago, Mgr Jorge Gomez, lui remit personnellement un message de Paul VI. - Paul VI délégua, comme envoyé spécial au Te Deum œcuménique d’Action de Grâces qui suivit l’investiture du Président Allende, le Nonce apostolique de la République Dominicaine, Mgr Antgnio del Giudice (« La Revista Catolica », n° 1015, p. 5885). - Le 19 novembre 1970, le nouveau représentant officiel de Paul VI au Chili, le Nonce apostolique Mgr Sotero Sanz Villalba, lorsqu’il présenta ses lettres de créance à Allende, « souligna spécialement sa complaisance pour le programme de progrès social dans lequel s’est engagé le Pays et lui assura l’aide de l’Eglise » (« La Revista Catolica », n° 1015, p. 5886). - Le même Nonce se présenta au cocktail offert par Allende à Fidel Castro dans le palais présidentiel de la Moneda, et déclara que le voyage du dictateur communiste cubain était « trés enrichissant, aussi bien pour Cuba que pour le Chili » (« El Clarin », 14 novembre 1971). - En août 1972, Paul VI envoya des compliments à Allende, par l’intermédiaire de son délégué personnel le Cardinal espagnol Arturo Tabera, qui visita officiellement le Pays (« El Mercurio », de Valparaiso, 29 août 1972). - En octobre 1972, pendant les poignantes manifestations de mécontentement populaire contre la politique gouvernementale, le Cardinal Silva Henriquez envoya de Rome - où il était allé pour une audience avec Paul VI - un message public à M. Allende, où il exprimait ses inquiétudes pour les événements et offrait de retourner tout de suite au Pays si Allende le croyait nécessaire (« El Mercurio », 29 octobre 1972). Donc, tout près de Paul VI, et pour ainsi dire du haut des degrés du trône pontifical, le Cardinal ne ressentit pas la moindre contrainte ou obstacle pour lancer la carte suprême de sa collaboration, par laquelle non seulement il aida la construction du régime marxiste de M. Allende, mais encore il lui offrit ses services pour aider le même régime à asphyxier les protestations de la population appauvrie et mécontente. En vue de ce tragique panorama, il est significatif que le Président marxiste Allende lui-même ait déclaré dans une entrevue accordée au « New York Times », à Santiago, en octobre 1970, que l’Eglise au Chili avait rompu avec sa doctrine traditionnelle. Entre autres, l’Allende déclara : « On sait parfaitement que les vieilles incompatibilités entre la franc-maçonnerie et l’Eglise sont dépassées. Ce qui est le plus important, l’Eglise Catholique a subi des changements fondamentaux... J’ai eu l’occasion de lire la Déclaration des évêques à Medellin; le langage qu’ils emploient est le même que celui que nous employions depuis notre initiation à la vie politique, il y a trente ans. A cette époque-là, nous étions condamnés pour tel langage, qui est aujourd’hui employé par les évêques catholiques... Je crois que l’Eglise ne sera pas un facteur d’opposition au gouvernement de l’Unité Populaire. Au contraire, elle sera un élément en notre faveur... ». Ces déclarations - qui décrivent un des plus grands scandales de l’histoire de l’Eglise de tous les temps - ne furent l’objet d’aucune protestation de la part des autorités ecclésiastiques chiliennes, ni du Saint-Siège. « Dites un seul mot et notre Patrie sera sauvée » Finalement, le consentement donné par Paul VI à l’orientation que l’Episcopat et les secteurs les plus influents du Clergé chilien prirent sous l’égide de son autorité et de son pouvoir est corroboré par son attitude en face des mémorables demandes que la TFP chilienne lui adressa. La première fut le message respectueux et filial adressé à Paul VI en 1968, où on le priait de prendre des mesures urgentes contre l’infiltration communiste dans les milieux catholiques. La TFP prévoyait le danger, menaçant pour le Pays et qui prenait corps, d’un transfert massif du Clergé et de l’opinion catholique vers la gauche, dans les termes de la plus récente stratégie du communisme, brillamment décrite par le Pr Plinio Corrêa de Oliveira dans son œuvre de répercussion internationale : « Transfert idéologique inaperçu et Dialogue ». Cette pétition publique adressée à Paul VI fut soussignée par 121 210 Chiliens. La réponse de Paul VI fut un silence lourd et significatif. Tandis que des enfants fidèles de l’Eglise étaient ainsi traités avec une froideur inusitée, l’opinion publique put constater avec quelle affabilité seraient reçus par Paul VI les terroristes africains - ce qui mérita une protestation officielle, auprès du Vatican, de la part du gouvernement du Portugal. De la même façon on a reçut et on continue à recevoir avec pareille bienveillance non seulement des personnages du monde politique du rideau de fer, mais encore des chefs d’Eglises collaboratrices qu’ils ont transformées en instruments de domination de leurs respectives patries. Et de quelle cordiale impunité jouissent au Vatican les évêques cubains qui maintinrent et maintiennent une conduite si analogue à celle des évêques chiliens l Les membres du Conseil national de la TFP chilienne, conjointement avec d’autres militants de la Société, s’adressèrent à Paul VI en lettre du 8 octobre 1970, dans la certitude qu’un seul mot de sa part suffirait pour empêcher que les parlementaires démocrates-chrétiens consomment la victoire d’Allende au Congrès. Encore une fois, la réponse du Père commun de la Chrétienté fut le plus complet et dédaigneux silence. Conclusion Voilà, jusqu’à présent, la triste trajectoire du Clergé et de l’Episcopat chilien, considérés comme un tout, à part quelques honorables exceptions. Finalement, devant ce panorama d'une gravité sans précédents, la Société Chilienne de Défense de la Tradition, Famille et Propriété se trouve dans l’obligation évidente d’alerter ses frères dans la Foi contre la néfaste influence que le Clergé exerce dans le processus dramatique de « communisation » du Pays. Donner ce cri d'alerte, c'est pour nous un devoir de conscience que nous accomplissons avec douleur. Nous le faisons pour que l’opposition au régime communiste au Chili ne perde rien de sa force dans la fausse impression qu’elle a de ne plus trouver de fondements dans la doctrine catholique et dans la conscience chrétienne. Du fond de nos âmes, nous désirons que le peuple chilien soit toujours encore plus ferme dans la Foi, et que Notre-Dame au Mont-Carmel, Reine et Patronne du Chili, nous donne dans les jours à venir la grâce d’un Clergé effectivement catholique, pour que s’accomplisse dans notre Patrie, aussi, le triomphe de son Cœur Immaculé, comme Elle le promit à Fatima. Santiago, 23 février 1973. Pour la Société Chilienne de Défense de la Tradition, Famille et Propriété : Luis Montes Bezanilla Andrés Lecaros Concha |