© pour cette 2ème édition française: Société Française pour la Défense de la Tradition, Famille et
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Septembre, 1995 |
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Pour faciliter la lecture, les références aux allocutions pontificales
ont été simplifiées: est désigné d'abord le sigle correspondant (voir
ci-dessous), puis l'année où l'allocution a été prononcée.
PNR = Allocution au Patriciat et à la Noblesse romaine
GNP = Allocution à la Garde noble pontificale
Certains extraits des documents cités ont été soulignés en caractères
gras par l'auteur.
Titre original: Nobreza e elites tradicionais análogas nas Alocuções
de Pio XII ao Patriciado e à Nobreza Romana (Editora Civilização, Lisboa,
1993).
Traduit du portugais par Catherine Goyard
1ère édition française: Editions Albatros, 1993.
Cet ouvrage a aussi été publié en italien (Marzorati Editore, Milan),
en espagnol (Editorial Fernando III, Madrid) et en anglais (Hamilton
Press, Lanham MD, USA).
la noblesse appauvrie
Saint Pierre Damien (1007-1072), docteur de l'Eglise,
souligne la diligence particulière dont on doit faire preuve pour soulager
les besoins de la noblesse appauvrie (1):
«Bien que l'aumône soit exaltée à toutes les pages des
Saintes Ecritures, que la miséricorde dépasse toutes les autres vertus et
parmi les oeuvres de piété obtienne la palme, la prééminence revient
cependant à la miséricorde qui secourt les malheureux autrefois dans
l'abondance.
«Nombreux sont ceux en effet qui, rendus célèbres par
une ascendance illustre, vivent néanmoins dans l'embarras à cause de la
pauvreté de leur patrimoine familial. Beaucoup sont honorés aussi du titre
de chevalier d'anciennes lignées mais se sentent humiliés à cause de la
pénurie des biens les plus indispensables à la vie domestique: de par la
dignité de leur rang, ils sont obligés d'assister à des réceptions où leur
égalité de niveau social se trouve confrontée à leur grande infériorité de
fortune. Même lorsqu'ils sont martyrisés par l'inquiétude de leur
dénuement ou que, pressés par la nécessité, ils tombent dans une situation
extrême, ils ne sauraient quémander leur nourriture comme des mendiants.
Ils préfèrent mourir plutôt que mendier en public, ils sont gênés si l'on
vient à connaître leur situation, ils ont honte d'avouer leur détresse.
Tandis que d'autres proclament leur misère et même souvent exagèrent leur
pauvreté afin de susciter la compassion et recevoir ainsi des aumônes plus
abondantes, ceux-là dissimulent leur situation autant qu'ils le peuvent,
de peur que ne transparaisse subitement et à leur grande honte, quelque
signe de leur pauvreté.
«Il s'agit donc de comprendre leur indigence plus que
de la voir; de la conjecturer à certains signes qui se découvrent
furtivement plus que de la déduire d'indices évidents.
«En tout cas, grande sera la récompense de ceux qui
auront secouru cette détresse non manifeste mais occulte, indique le
Prophète en disant: "Bienheureux celui qui prend souci du malheureux et du
pauvre" (Ps.40,2). Discerner les pauvres déguenillés et infirmes qui
errent par les rues, ne demande pas un grand effort: nous les remarquons
d'un coup d'oeil; nous devons par contre deviner ceux qui sont pauvres
dans leur intérieur, puisque leur misère ne se dévoile pas dans leur
extérieur.»
(1) MIGNE,
P.L., t. CXLV, col. 214-215.
Les faits suivants de la vie de sainte Isabelle, Reine
de Portugal (1274-1336), manifestent un trait édifiant de son cœur:
«Elle mettait un soin particulier à venir en aide aux
personnes qui, après avoir vécu de noble manière et possédé de grandes
ressources, tombaient dans une nécessité et une misère accrues par la
honte de demander. Elle les secourait avec autant de générosité que de
discrétion pour que ses bienfaits n'eussent pas, pour contrepartie, leur
confusion.
«Elle avait en son palais des bourses spéciales pour
les enfants de gentilshommes pauvres: on les y éduquait conformément à
leur haute position. Elle distribuait des dots pour marier des jeunes
filles pauvres de bonne société et, de ses mains royales, s'amusait à
apprêter leur coiffure nuptiale.
Elle abritait et élevait près d'elle beaucoup
d'autres orphelines, filles de ses propres vassaux, qu'elle pourvoyait
d'une abondante dot et embellissait de ses propres joyaux le jour de
leur mariage. Et pour que son exquise bonté se prolongeât au-delà de sa
mort, elle institua un fonds dans son monastère de Sainte-Claire pour
doter les orphelines nobles, et ordonna qu'une partie des bijoux qu'elle
léguait à ce couvent fussent prêtés aux dites demoiselles le jour de
leurs noces (2).»
(2) J. Le Brun,
Santa Isabel, Rainha de Portugal, Livraria Apostolado da Imprensa,
Porto, 1958, p. 127-128.
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